Dans le domaine viticole, les domaines Pavie Macquin à Saint-Emilion et Lynch-Bages à Pauillac adoptent des approches différentes, loin de la certification bio. Pavie Macquin prône une approche de "biodynamie raisonnée", tandis que Lynch-Bages mise sur une viticulture précise.
Ces deux personnes ont souvent l'occasion de voyager dans le monde entier avec l'Union des grands crus. Ils prennent les mêmes vols, séjournent dans les mêmes hôtels et fréquentent les mêmes salons pour promouvoir les vins de Bordeaux. Ils veulent faire découvrir la diversité des saveurs du plus grand vignoble de France. Jean-Charles Cazes, qui est à la fois copropriétaire et directeur général des domaines Cazes, dont Lynch-Bages, et Nicolas Thienpont, qui est le gérant de Pavie Macquin, expliquent chacun à leur manière la relation entre leurs vins et le terroir d'où ils proviennent.
Les vins de Lynch-Bages, un cinquième grand cru classé en 1855 à Pauillac (considéré par les connaisseurs comme un deuxième cru). Et les vins de Pavie Macquin, un premier grand cru classé en 2006 à Saint-Emilion, partagent la pureté et l'élégance du goût des grands vins de Bordeaux qui enchantent les amateurs. L'agriculture sensible de Pavie Macquin se pratique sur les sols calcaires à astéries du plateau de Saint-Emilion, où l'on trouve des argiles plus ou moins puissantes, des molasses du Fronsadais et enfin le calcaire, qui procure des sensations aériennes.
Sur la rive gauche de la Gironde, au nord de la péninsule du Médoc, Lynch-Bages observe le passage de la "rivière" comme on l'appelle ici. Il met en place une approche environnementale réfléchie et détaillée, inspirée de la science agronomique, afin de préserver et mettre en valeur cet endroit exceptionnel. Situé aux portes de Pauillac, ce domaine classé repose sur des sols de graves garonnaises profondes provenant des Pyrénées et transportées par la puissante Garonne : des pierres blanches comme de l'ivoire, des bleues comme les étoiles et aussi du sable. Les raisins y murissent en douceur, nourris par les racines qui plongent dans les profondeurs de ce sol miraculeux.
Une collaboration harmonieuse avec la nature
Sur la rive droite, le merlot et le cabernet franc sont cultivés, tandis que sur la rive gauche, le cabernet sauvignon est principalement utilisé, avec une petite quantité de merlot et à peine de franc, ainsi qu'une touche de petit verdot. Comparer ces deux régions ne serait pas pertinent. Suggérer que les techniques agricoles s'opposent à la nature ou cherchent à l'exploiter serait absurde. Les rendements excessifs sont désormais révolus à Bordeaux.
Dans ce cas, il s'agit d'identifier les similitudes entre les comportements environnementaux et agricoles qui, contrairement aux règles de base de la géométrie, finissent par se rejoindre dans l'expression de la richesse minérale. Un objectif esthétique se forme, en accord avec le respect global de la nature qui entoure les vignes et contribue à leur existence. Il s'agit d'une sorte d'écologie qui n'est pas opposée à la technologie, mais plutôt d'une collaboration avec la nature, qui a toujours le dernier mot. Dans cette marge étroite, les deux châteaux mettent en œuvre des actions qui semblent être les plus adaptées aux intérêts du sol, des plantes, des fruits, et à l'obligation fondamentale de produire du vin – et du vin de très bonne qualité s'il vous plaît.
Ainsi, à Pavie-Macquin, on a été contraint d'abandonner la pratique stricte de la biodynamie après une grave attaque de mildiou en 1993. Lors de son arrivée en 1994, Nicolas Thienpont a suggéré avec humour de mettre en place une "biodynamie raisonnée". Ainsi, en juin, si les conditions météorologiques humides le nécessitent, on utilise un produit pour protéger la floraison afin de ne pas perdre la récolte. Le reste des pratiques environnementales, supervisées de près par Cyrille Thienpont, fils de Nicolas, sont basées sur l'agriculture biologique et conservent les outils de la biodynamie tels que les infusions, les décoctions et les composts. Dans cet environnement sain, il n'est pas nécessaire d'utiliser des méthodes de confusion sexuelle contre les vers de la grappe car il n'y en a pas.
La vigne est entourée d'herbes naturelles, avec des plantes concurrentes qui limitent la vigueur de la vigne selon les différentes zones. Les légumineuses et les céréales sont utilisées pour aider les vignes les plus faibles. Dans ce vignoble, le merlot occupe 80% des surfaces, tandis que le reste est réservé au cabernet franc. Au fil des siècles, les hommes ont planté de majestueux chênes autour de la vigne, créant ainsi un balcon céleste. L'agroforesterie est ici une pratique courante. De plus, des haies d'espèces locales ont été plantées, offrant un habitat aux oiseaux et aux abeilles et favorisant la biodiversité. Grâce à des méthodes agricoles respectueuses de l'environnement, le goût des fruits et donc du vin a changé au cours des trente dernières années. Le vin est désormais élaboré dans un nouveau chai souterrain situé au cœur d'une roche calcaire. Grâce à son inertie thermique, l'utilisation de la thermorégulation est réduite, ce qui permet de réaliser des économies d'énergie importantes. De plus, les déchets viticoles et vinicoles sont traités de manière rigoureuse.
À Lynch-Bages, après plus de quatre siècles de progrès dans le domaine de l'oenologie, la famille Cazes a décidé de revenir à l'essence même du métier depuis 2006 : le raisin. Bien qu'il ait toujours été pris en compte, la quête de perfection a poussé la famille à se plonger dans l'univers de la viticulture de haute précision. Ils ont été parmi les premiers à utiliser la cartographie satellitaire pour analyser de manière précise les différentes parcelles et les caractéristiques des terroirs.
Les 90 sections de terres cadastrales ont donné naissance à 200 unités géo-pédologiques – c'est-à-dire 200 goûts qui contribuent à la complexité extrême de la délicatesse des sensations que procure le vin issu de cépages en harmonie avec les sols qui les accueillent. Dans cette approche minutieuse, les besoins en fertilisation ont été localisés géographiquement. Le repos des sols est accompagné par l'éclat des jachères fleuries. Les insectes et les oiseaux participent à cet équilibre. Ici, la terre est vivante. Tous les efforts déployés pour obtenir de grands fruits se poursuivent dans le nouveau chai, conçu par Chien Chung (Didi) Pei. La toiture en gradins offre la lumière du nord des ateliers d'artistes. L'économie d'électricité est évidente, car le cuvier non climatisé est équipé de vitrages anti-UV et de pare-soleil au sud. Sans l'utilisation d'air froid artificiel, on vit dans une ambiance tempérée. Bientôt, les panneaux solaires permettront d'atteindre l'autonomie énergétique.
Dans les deux situations, nous pouvons observer des comportements responsables et engagés envers l'environnement. Ces comportements ne rompent pas avec la nature, mais plutôt la prolongent.
Jean-Luc Barde est l
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