L'histoire fascinante des couleurs : Arsenic et vert mortel
LA TEINTURE ET LES COLORANTS (3/5) – La création du pigment "vert émeraude" en Bavière au début du XIXe siècle, suivi de son introduction dans l'industrie par l'Angleterre victorienne, a entraîné une tragédie sanitaire dont les conséquences suscitent encore l'effroi de nos jours.
Écrit par Jules Grandin et Jean-Marie Colomb
Les colorants naturels se distinguent des colorants synthétiques par le fait qu'ils ne sont jamais constitués d'une seule molécule colorante, comme l'explique le spécialiste des teintures naturelles Dominique Cardon. La question de la couleur verte a été un défi, car son rendu n'a jamais été pleinement satisfaisant. Cette couleur est présente dans la synthèse chlorophyllienne des plantes et a été produite par la réaction au cuivre, donnant le vert-de-gris, également connu sous le nom de "vert de Grèce", ou par l'association de minéraux tels que la glauconite et la céladonite, donnant la terre verte, utilisée depuis l'Antiquité à Chypre et à Vérone.
Cependant, la couleur de ces pigments s'estompe rapidement, ce qui pousse les gens à chercher un vert plus durable au début du XIXe siècle. Les pharmaciens et les chimistes sont alors sollicités. En 1814, à Schweinfurt en Bavière, le pharmacien Friedrich Russ réussit à obtenir par hasard des cristaux d'un vert éclatant en mélangeant du vert-de-gris avec de l'arsenic blanc et de la soude dissous dans du vinaigre. C'est ainsi que le pigment "acéto-arsénite de cuivre" voit le jour.
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