Dans sa chronique, Marc Lambron parle de l'écrivain Mauriac pendant l'été. Ce dernier semblait jouer un rôle en faisant semblant de poursuivre les flèches qu'il lançait joyeusement.
Écrit par Marc Lambron
Relire les œuvres de Mauriac en été ? Il y a exactement cent ans, en 1924, l'écrivain de Bordeaux publiait un roman appelé "Le Mal". Ce sujet est toujours d'actualité. Tout écrivain qui se lance dans la chronique sait que Mauriac en était un maître incontesté. Disparu en 1970, il fut le dernier prix Nobel de littérature à siéger à l'Académie française avant l'élection récente de Mario Vargas Llosa. Ce grand catholique avait un sens aigu de la critique et n'hésitait pas à exprimer ses opinions de manière acerbe. Par exemple, lorsqu'il a obtenu la grand-croix de la Légion d'honneur en supplantant Pasteur Vallery-Radot, petit-fils de Pasteur, Mauriac a commenté avec peu de charité : "Mon confrère est entré dans une rage que même son grand-père n'aurait pu apaiser". Sur les séances de l'Académie, il a dit : "On y dialogue de socle à socle". Cet homme au timbre de voix cassé, le tireur d'élite du quai Conti, a trouvé dans ce palais des mots un terrain propice à ses critiques acérées.
Cependant, le monde de Mauriac est devenu difficile à comprendre pour nous. La base de la statue est envahie par le lierre. Son œuvre dépeint un paysage intérieur étrange, reflétant les tourments refoulés et la chair puritaine de la bourgeoisie catholique française entre 1850 et 1950. Les dilemmes d'une psyché qui trouve du plaisir dans la souffrance, le masochisme d'une culture qui se flagelle avec des objets profanes, tout cela semble être une perte de temps sur Terre. Les romans de Mauriac décrivent un monde où la souffrance est nécessaire pour se sentir vivant, où l'on implore les saints pour apaiser les frustrations sexuelles inexprimées. Les descriptions d'un Christ déchiré et d'un désert affreux dominent ces romans, où l'on peut presque entendre les cris d'une vieille fille prude. Ce paysage brûlé était le moyen pour Mauriac de rejoindre les hautes sphères de la société, en riant de manière perfide tout en cachant ses propres sécheresses.
D'où vient-il que ses écrits restent si marquants, tel un bouquet de houx sauvé des flammes ? C'est grâce à son style unique, ses coupes à la française, sa sensualité subtile mais vibrante, ses ruptures, et la capacité à distiller un venin de cobra de haut rang. Pour lui, la méchanceté était un art subtil – Mauriac semblait courir avec un air contrit derrière les flèches qu'il tirait avec plaisir. Son "Bloc-notes" demeure comme une armoire remplie de vieux fusils, chargés de balles empoisonnées : ses chroniques sont comme une armurerie. Malgré son plaisir à attaquer les pécheurs, Mauriac reste un maître armurier, fournissant des recettes d'acuité pour notre époque.
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L'écrivain Marc Lambron parle de l'œuvre de Mauriac en été.
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