Les avancées telles que l'intelligence artificielle et la thérapie génique visent à combattre la surdité. D'ici 2050, environ 2,5 milliards de personnes auront des problèmes auditifs en raison du vieillissement naturel et de l'exposition prolongée à des sources de bruit élevé. Les scientifiques et les entreprises travaillent à améliorer les appareils auditifs actuels et à créer de nouvelles solutions, notamment la thérapie génique.
Écrit par Florence Bauchard
Pendant longtemps négligée, l'étude de l'audition attire désormais l'attention des chercheurs, des autorités publiques et des professionnels de la santé. En effet, avec le vieillissement de la population, l'augmentation des maladies chroniques, l'utilisation de médicaments et les effets nocifs du bruit sur les jeunes, les problèmes auditifs deviennent de plus en plus importants en matière de santé publique.
Les données récemment publiées par l'Organisation mondiale de la santé en début d'année 2023 montrent que 1,5 milliard de personnes souffrent actuellement de problèmes d'audition, nécessitant des services de réadaptation pour 430 millions d'entre elles. Selon l'OMS, ce nombre devrait presque doubler d'ici 2050, ce qui représente une augmentation significative de la population nécessitant ces services.
Selon l'Organisation mondiale de la Santé, plus d'1 milliard de jeunes adultes courent le risque de subir des dommages auditifs permanents qui pourraient être évités en raison de leurs pratiques d'écoute non sécurisées.
Selon une organisation internationale, plus d'1 milliard de jeunes adultes pourraient souffrir de problèmes auditifs permanents causés par des habitudes d'écoute dangereuses. Ces troubles auditifs peuvent entraîner des conséquences graves pour la santé, comme la dépression, le manque d'activité physique et même des risques de chute.
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Depuis la création des aides auditives et des implants cochléaires il y a 50 ans, il n'y a pas eu de nouvelles avancées révolutionnaires. Cependant, les avancées en génomique et en biologie offrent de grands espoirs dans le traitement d'une maladie très complexe en raison de ses nombreuses causes.
Des chercheurs de l'université Fudan de Shanghai ont récemment suscité l'attention en publiant un essai de thérapie génique pour traiter une forme rare de surdité. D'autres études menées par des équipes en France et aux États-Unis devraient confirmer dans les deux prochaines années l'efficacité de ces nouvelles approches.
Dans le domaine des traitements traditionnels, les avancées de l'intelligence artificielle offrent de nouvelles possibilités. Les aides auditives offrent désormais plus de fonctions, il existe une application de sous-titrage automatique pour les personnes sourdes et une approche innovante de la conduction osseuse. Tous ces éléments témoignent d'une profusion d'innovations dans le domaine de la santé auditive.
L'ouïe, un capital précieux
Dès la naissance, nous sommes pourvus d'environ 12 500 cellules ciliées externes, 3 500 cellules ciliées internes et 30 000 neurones auditifs qui composent l'oreille interne ou la cochlée. Malheureusement, à partir de l'âge de 20 ans, nous commençons à perdre ces cellules à un rythme de 3,5 à 7% par décennie. À 70 ans, environ la moitié des cellules ciliées externes et un quart des cellules ciliées internes auront disparu naturellement. Il est donc essentiel de prendre soin de notre audition tout au long de notre vie.
Jean-Philippe Marie de Chastenay a passé beaucoup de temps à chercher une solution pour aider son père, qui est sourd d'une oreille suite à une opération chirurgicale. En tant que cofondateur et PDG de Sounduct, il a cherché à améliorer le procédé de la conduction osseuse. Ce procédé, utilisé depuis le XIXe siècle, fonctionne en faisant vibrer les os qui entourent le système auditif. Jusqu'à présent, l'application de ce procédé naturel de manière invasive sous forme d'implant osseux a limité son utilisation. Cependant, les deux modèles de casque de Sounduct déposés ont été conçus pour s'adapter à toutes les formes de crânes.
Les avancées de la génomique et de la biologie suscitent de grands espoirs pour une maladie extrêmement complexe en raison de la diversité de ses causes.
Les premiers tests réalisés avec des proches ont donné des résultats très positifs. La start-up strasbourgeoise, labellisée Deeptech par la BPI, prévoit de commencer des essais sur plusieurs dizaines de personnes au premier trimestre. Ce dispositif a reçu l'autorisation de l'ANSM à la fin de l'année dernière. Le directeur général et cofondateur, Olivier Gauthier, souhaite traiter un large éventail de maladies. Lauréat de France 2030, Sounduct envisage de produire ce dispositif sur le territoire national afin d'obtenir le marquage CE et l'approbation de la FDA américaine.
Thibault Duchemin a passé beaucoup de temps à traduire pour sa famille sourde avant de créer une application pour aider les sourds à communiquer plus facilement dans des environnements éducatifs ou professionnels. Récompensé par le MIT en 2017 pour son innovation, cet ingénieur diplômé des Ponts et Chaussées et spécialisé en intelligence artificielle à Berkeley a conçu une application de sous-titrage basée sur l'intelligence artificielle la même année.
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ENTRETIEN avec Thibault Duchemin (Ava), qui aide les personnes sourdes et malentendantes
Actuellement, AVA est utilisée par 200 000 utilisateurs, principalement en France et aux États-Unis où Thibault Duchemin réside. Parmi les clients d'AVA se trouvent de grandes entreprises comme Air France, Orange, L'Oréal, Disney, ainsi que des petites entreprises comme Deezer et des universités telles que Paris VIII.
Avec les avancées impressionnantes de l'intelligence artificielle, il existe désormais de nombreuses options de sous-titrage automatique en ligne. Cependant, Thibault Duchemin souligne que ces solutions ne conviennent pas à toutes les situations. Pour des situations plus complexes, les utilisateurs de AVA ont la possibilité de prendre rendez-vous avec un professionnel de la transcription entre 7h et 19h. Ce professionnel se connectera à la réunion en question pour fournir ses services.
Des appareils auditifs sur mesure
Depuis la création de la première aide auditive électrique en 1899, les prothèses auditives ont considérablement progressé grâce aux avancées dans la réduction de leur taille et dans les capacités de calcul. Selon Fabrice Vigneron et Guillaume Joucla, respectivement président et vice-président du pôle audiologie du Snitem, les appareils auditifs d'aujourd'hui sont de véritables prouesses technologiques.
Avec les avancées de la technologie de l'intelligence artificielle, la capacité à comprendre malgré le bruit s'améliore, tout comme la possibilité de se connecter directement à son téléphone ou sa télévision. La personnalisation devient de plus en plus réalisable. Selon Stéphane Gallego, vice-président du syndicat des audioprothésistes, les nouvelles technologies embarquées permettent de mieux comprendre les besoins du patient et de son environnement, en tenant compte par exemple des mouvements de tête. De nouveaux systèmes encore plus avancés vont être développés dans les prochaines années. Cela garantit une meilleure rééducation de l'oreille grâce à une meilleure gestion des sons environnants.
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Des avancées technologiques telles qu'un détecteur d'Alzheimer ou une oreillette bluetooth vont prochainement rendre l'appareil auditif plus performant.
Avec des capteurs qui peuvent détecter les chutes ou surveiller le rythme cardiaque, ces appareils jouent un rôle important dans la prévention des accidents. Dans le futur, des capteurs infrarouges pourront même mesurer la pression artérielle, ce qui permettra de détecter rapidement toute anomalie chez les personnes âgées et déclencher des alertes en conséquence.
Des avancées prometteuses dans le domaine de la thérapie génique
Après vingt-cinq ans depuis la découverte et la reproduction du gène de l'otoferline responsable d'une forme rare de surdité par la professeure Christine Petit et son équipe à l'Institut Pasteur, quatre enfants âgés de 2 à 6 ans ont retrouvé une audition presque normale suite à un traitement de thérapie génique à l'hôpital spécialisé en ophtalmologie et ORL de l'université Fudan à Shanghai.
En se basant sur des recherches occidentales déjà publiées, les Chinois ont devancé les entreprises américaines Akouos et Decibel Therapeutics ainsi que la société française Sensorion, qui vient de renouveler son partenariat de recherche avec Pasteur. Alors que Decibel a déjà lancé des essais concluants aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et en Espagne, Sensorion attend actuellement l'approbation réglementaire pour commencer les siens en France, puis en Allemagne. Selon Nawal Ouzren, directrice générale de Sensorion, l'intervention consiste en une seule injection du gène correct qui code pour la protéine nécessaire à la communication entre les cellules sensorielles ciliées et le nerf auditif dans l'oreille interne, idéalement à un âge où l'enfant est en mesure d'acquérir le langage.
La chercheuse Christine Petit, de Pasteur, suggère qu'une approche similaire pourrait être envisagée pour les formes tardives de surdité, à condition qu'elles soient causées par un seul gène. Son équipe cherche à mieux caractériser les personnes portant des variants pathogènes du gène GJB2, qui est associé à la surdité génétique congénitale et à la presbyacousie précoce. Ils espèrent mener des essais cliniques car plus de 200,000 personnes en Europe et aux Etats-Unis sont concernées, soit dix fois plus que pour l'otoferline. Pour les formes causées par un seul gène, la thérapie génique pourrait être une option efficace selon la chercheuse.
Sensorion, une entreprise basée à Montpellier, collabore avec une dizaine d'hôpitaux européens sur l'étude du GJB2. Nawal Ouzren souligne que cette protéine est plus complexe à manipuler que l'otoferline. En ce qui concerne les formes multigéniques et plurifactorielles, l'objectif est de comprendre les dysfonctionnements au niveau des neurones et de la cochlée, afin de potentiellement les traiter avec des médicaments actuels ou futurs.
De plus en plus de options de traitement sont disponibles, allant des médicaments fabriqués chimiquement aux traitements géniques et cellulaires qui seront utilisés dans le futur. En attendant, il est recommandé de limiter l'exposition au bruit pour protéger notre audition.
[Premièrement publié le 25 janvier 2024]
Florence Bauchard
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