Une entreprise française offre une large sélection de cartouches d'impression réutilisées ou compatibles, produites en France ou dans les pays voisins. Est-ce enfin une solution plus écologique pour cette consommation coûteuse, polluante et mal recyclée ?
Par moi, Pierre Fortin
Tout comme les piles ou les ampoules, les cartouches pour imprimantes font partie de ces objets agaçants qui ne doivent pas être jetés chez soi, que ce soit dans le bac de recyclage, la poubelle ordinaire ou même dans le compost. Non, ces petits déchets capricieux doivent être triés séparément et déposés dans des points de collecte spécialement aménagés à l'entrée de certains magasins et de nombreux supermarchés. Pourquoi un tel traitement spécial ? Probablement en raison des nombreux composants dangereux présents dans ces consommables apparemment inoffensifs. Une cartouche peut contenir du plastique, du noir de carbone, du glycol, de l'aluminium, du nitrate d'argent et même de l'arsenic.
Cependant, il semble que la population ait du mal à comprendre l'importance de trier séparément les cartouches d'encre afin d'améliorer leur recyclage. Selon les chiffres fournis par le gouvernement en 2018, 75 millions de cartouches d'encre sont utilisées chaque année en France, dont 6 650 tonnes dans les entreprises et 1 850 tonnes dans les foyers. Malheureusement, seulement 24 % de ces cartouches ont été collectées dans le but d'être réutilisées ou de recycler leurs composants. De plus, ce chiffre n'a été atteint que grâce à un accord volontaire entre les acteurs de l'industrie.
Cependant, l'opérateur Cartouche Vide, qui est autorisé par l'organisme de recyclage Ecosystem, souligne que les cartouches ont un impact environnemental non négligeable. En plus de prendre entre 400 et 1 000 ans pour se décomposer, chaque cartouche émet entre 1,5 kg et 4,8 kg de CO2 lors de sa fabrication. Cela signifie qu'en France, entre 112 000 et 360 000 tonnes de dioxyde de carbone sont rejetées chaque année ! Il est également important de mentionner que la grande majorité de ces cartouches est fabriquée en Asie. Benoît Deschamps, qui a une expérience de plusieurs années dans des grandes entreprises proposant des solutions d'impression, est bien conscient de cette problématique. Il connaît également tous les défauts de ce marché.
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Après avoir voyagé à travers le monde pour le compte de grandes entreprises, Benoît Deschamps décide de revenir en France en 2018 pour fonder sa propre société, EBMD. Cette entreprise se spécialise dans les conseils et les solutions informatiques et d'impression. Son frère, Frédéric, qui était également expatrié depuis un certain temps, le rejoint en France avec l'idée de collaborer et de créer un projet ensemble. Ils décident d'étudier le marché des cartouches d'impression, qui voit l'émergence de solutions présentées comme étant plus économiques ou plus écologiques ces dernières années. Ces nouvelles options comprennent la vente de cartouches "reconditionnées", qui sont fabriquées à partir de cartouches usagées collectées, nettoyées et remplies à nouveau d'encre, ainsi que des cartouches "compatibles", qui sont conçues pour être similaires aux cartouches d'origine mais à un prix beaucoup plus abordable car elles ne sont pas de marque.
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Après avoir analysé le marché, nous avons constaté que de nombreux vendeurs français de cartouches reconditionnées ou compatibles se fournissaient en Asie, ce qui était peu favorable sur le plan environnemental, explique Frédéric Deschamps. Les deux frères ont donc créé la société Lencre fin 2021, dans le but de vendre autant de cartouches que possible fabriquées en France ou, à défaut, en provenance du Vieux Continent.
Afin d'accomplir cela, Lencre a établi des partenariats avec plusieurs entreprises basées en Allemagne, en Espagne et à Lyon, notamment avec la société Lama. Selon Frédéric Deschamps, cela permet de réduire considérablement le transport et l'empreinte carbone associée. Seules les puces électroniques des cartouches proviennent encore d'Asie, car elles ne sont pas produites en Europe. Grâce à ces accords, la start-up a pu constituer un catalogue de plus de 6 500 références comprenant des cartouches d'encre et des cartouches laser, des rubans d'imprimante matricielle et d'autres toners. Elle vend à la fois des cartouches des marques d'origine telles qu'Epson, Canon, HP, Fuji Xerox, ainsi que des consommables compatibles ou reconditionnés, commercialisés sous la marque Lencre et fabriqués par ses partenaires français et européens.
Une des principales avantages de ces consommables est leur prix nettement inférieur à celui des cartouches originales. Les fabricants d'origine ajoutent une marge importante sur les cartouches pour compenser la baisse de prix des imprimantes elles-mêmes. Ainsi, une cartouche reconditionnée peut coûter jusqu'à 30 % de moins que l'originale, tandis qu'une cartouche compatible peut être environ 70 % moins chère. Même si nous choisissons des produits français ou européens, notre marge est bien inférieure à celle des fabricants de cartouches qui s'approvisionnent en Asie. Cependant, nous économisons sur les coûts de transport et nous avons une marge normale, comme toute autre entreprise.
Depuis qu'elle a commencé ses activités en 2022, la petite entreprise, qui compte huit employés, a réussi à fidéliser environ 1 000 entreprises et institutions qui achètent régulièrement ses produits. Parmi ses clients figurent le distributeur automobile Gueudet, le chauffagiste Garanka et les hôpitaux de Paris (AP-HP). Les cartouches d'encre sont disponibles à l'achat sur son site internet, ainsi que sur certaines places de marché en ligne comme Amazon ou Mercateo, et sont également vendues dans plusieurs sociétés spécialisées. Elles sont accessibles aux particuliers ainsi qu'aux professionnels, bien que ces derniers représentent 95 % de l'activité de Lencre.
Pour attirer les entreprises, la start-up a développé un abonnement qui permet de simplifier la livraison de cartouches. Selon Frédéric Deschamps, pour 9,99 euros par mois, ils installent un logiciel chez leurs clients qui passe automatiquement une nouvelle commande de consommables dès que le niveau d'encre atteint 30 %. Cela permet à leurs clients de gagner du temps.
Le prix des cartouches reconditionnées est trop élevé. Cependant, il reste encore un défi à relever : celui de gagner la confiance des consommateurs. La majorité des ventes d'encre se composent de cartouches compatibles (environ 65% des transactions), suivies des cartouches originales (25%) et des cartouches reconditionnées (10%) qui sont en dernière position. Le directeur général de l'entreprise explique que leurs clients achètent souvent un mélange de cartouches compatibles et originales. Cela s'explique probablement par le fait qu'à l'époque où les cartouches compatibles et reconditionnées ont fait leur apparition sur le marché, il y a eu des mauvaises surprises avec des cartouches de mauvaise qualité qui ne fonctionnaient pas, voire qui endommageaient les imprimantes. En achetant un mélange de cartouches originales et compatibles, les clients se protègent donc en cas de produit défectueux, même si cela leur coûte plus cher.
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Dans le but de regagner la confiance des clients, l'entreprise propose une livraison gratuite pour tout achat de 30 euros ou plus. De plus, elle offre une garantie d'un mois sur ses produits consommables, qui peuvent être échangés gratuitement en cas de problème. De manière encore plus avantageuse, elle propose également une option à 4,99 euros qui permet d'étendre cette garantie à environ trois mois. Pour assurer la qualité de ses produits, ils sont certifiés ISO 9001, ce qui garantit leur fiabilité auprès des clients.
Cependant, il y a une autre anomalie qui concerne le faible volume de vente des cartouches reconditionnées, malgré le fait qu'elles soient les plus écologiques. Frédéric Deschamps exprime sa déception quant à la hausse mystérieuse des prix des cartouches reconditionnées, avec une différence de prix de moins en moins importante par rapport aux originales. Il soupçonne qu'il y ait un certain phénomène de marketing écologique qui a conduit certains fabricants à augmenter leurs prix de manière significative. Cependant, cela ne signifie pas que cette pratique devrait être abandonnée. En effet, une étude de l'Ademe, mentionnée par l'organisme Cartouche Vide, démontre que les cartouches reconditionnées, qui peuvent être rechargées en moyenne sept fois, émettent 60% de CO2 en moins que les cartouches originales.
Dans le but d'améliorer la récupération et de promouvoir le recyclage, Lencre offre gratuitement à ses clients des bacs pour collecter les cartouches usagées. C'est une étape essentielle pour aligner ce secteur aux exigences de la transition écologique.
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